Le minimalisme est né en réaction à deux courants majeurs de l'histoire de l'art, le pop art et le mouvement expressionniste abstrait. Une des oeuvres pionnières du minimalisme (alors que ce courant n'était pas encore nommé) a été Abstract Painting, de Ad Reinhardt.
Ad Reinhardt « Abstract Painting » 1963. Oil on canvas, 60 x 60" (152.4 x 152.4 cm)
Pourtant avec le temps, la notion d'art concret est venue se positionnée face à l'abstration. Car comme le dit Theo van Doesburg , initiateur du terme, « rien n'est plus concret, plus réel qu’une ligne, qu'une couleur, qu’une surface ». L'abstraction laisse libre court à l'imagination, à l'interprétation, d'ailleurs l'une des oeuvres les plus célèbres de Kandinsky est bourrée de symboles:
De plus, avec l'abstraction, la représentation figurative n'est pas interdite, elle doit plutôt être suggérée ou symbolisée.
Le minimalisme, finalement, est plus un art concret qu'un art abstrait. L'art minimal interdit la représentation figurative (bien que les Figures, géométriques ou autres, ne soit pas foncièrement exclu, elles servent toujours un propos plus vaste que leur simple représentation).
Bleu de Trondheim, par exemple, tiendrait plus de l'abstrait que du concret. Ces formes de couleurs peuvent être interprétées (des cellules par exemples). Et bleu racconte une vrai histoire (il le dit lui-même)... Si l'on considère le fondement de la bande dessinée comme étant sa narrativité bien spécifique, la lecture des « actes » de ces formes colorées se déroule grâce à la déduction: on voit ces tâches s'accoupler, se diviser, manger et donner vie à une autre petite forme colorée. Nous voyons un point de couleur entrer dans une autre tache colorée, et on a l'impression qu'elle vient de se faire manger. L'imaginaire se confronte à l'aspect potentiellement concret malgré nous. Ajoutons la référence explicite à Yves Klein et son IKB (Internationnal Klein Blue), dont les monochrommes bleus ont une symbolique de la qualité immatérielle de l'art qui tendent donc plus vers l'abstrait que vers le concret (la symbolique de l'immatériel plutôt que le bleu pour sa seule présence, même si c'est cette présence qui crée l'immatérialisation).
C'est tout l'inverse de Parcours Pictural de Greg Shaw, où les formes ou les couleurs n'ont pas d'autres significations, et où la narrativité est montré de sa façon la plus concrète: chaque image établit une relation avec la précédente et la suivante sans pour autant être interprétée différemment que ce qu'elle montre: une évolution d'une couleur sur une autre, ou d'une forme sur une autre.
Donc Parcours Pictural, oeuvre concrète, certes, mais est-elle minimaliste pour autant?
Je pense que oui, car, comme chez les artistes fondateurs du mouvement, le traitement met en avant un seul et unique sujet: La séquentialité et la narrativité typiquement Bande dessinée, sorte d'âme de ce médium.
Mais alors que penser de Mister O? Ou de Parrondo?
J'y reviendrais.
Ce texte est basé sur la discussion lisible dans les commentaires de l'entretien avec Lewis Trondheim, sur Du9.
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